Théophraste vous donne l'heure

La gazette de Théophraste    Par Elie Geffray

« À deux heures, il sera trois heures. »

Dois-je vous rappeler que samedi prochain, nous passerons de deux à trois heures d’un seul coup d’un seul. On perdra une heure en dormant. Que deviennent les heures perdues ? Peut-on les retrouver ? Il paraît que celle-ci, on pourra la récupérer dans la nuit du 28 au 29 octobre. C’est un prêté pour un rendu en quelque sorte. N’empêche, il y a de quoi s’y perdre. Edmond par exemple, se réveille toujours la nuit vers 2 heures et demie et met 30 minutes à se rendormir. Il s’en amuse : « Peut-être que je ne me réveillerai pas samedi. En tout cas pas à 2 heures et demie, puisqu’il n’y aura pas de 2 heures et demie. C’est sans doute ce qu’on appelle un temps mort. »

 Il plaisante, mais c’est au moment de remettre l’horloge à l’heure qu’il s’embrouille : on avance les aiguilles d’une heure ou le contraire ? Les explications de Yolande ne simplifient pas le problème : « Il y a le pour et le contre, explique-t-elle. Si on a une heure de moins, il faut la retrancher. Mais d’un autre côté, si le jour vient plus vite, il faut avancer l’horloge, non ? Comment on a fait quand on a passé à l’heure d’hiver ? Te rappelles-tu ? » Oui, Edmond se souvient qu’on avait dû faire appel à Maryse (« notre fille du Morbihan ») pour savoir comment faire, mais il ne souvient pas de ce qu’elle avait dit. Elle avait pourtant donné une formule qui vaut ce qu’elle vaut : « En Mars, on va vers les beaux jours, alors on est pressé, on accélère (donc tu avances d’une heure), tandis qu’en Octobre, on glisse vers l’hiver, alors tu freines (tu retardes d’une heure.) »

Dimanche matin, Yolande a surveillé l’horloge pour se rassurer et ne pas louper « sa messe. » Et c’est avec la ponctualité d’un chauffeur de sous-préfecture qu’Edmond l’a déposée devant l’église, à 10 heures 30, heure d’été. Après quoi, il a rejoint ses complices du « Haut-Débit. » « Alors quoi ? Se sont-ils exclamés. On se demandait si tu allais venir. On a appris que t’étais « mal foutu. » C’était même écrit dans l’Hebdo de la semaine dernière. Qu’est-ce qu’il t’arrive ? » Cela a été l’occasion d’un petit bulletin de santé qui nous a appris qu’une prise de sang avait révélé un déficit de Vitamine D. « Mine de rien c’est crevant. Vous rigolez vous. Mais moi, je n’en menais pas large. Je n’avais jamais été pris comme cela. Et à notre âge, on se pose des questions. »

Mais ses copains, rassurés, l’ont un peu charrié : « Tu vois, a dit Marcel. Si tu manques de vitamine D, cela prouve bien qu’il n’y en a pas dans le pastis. » - « Et puis, a ajouté Lucien, avec l’heure d’été il y aura plus de soleil, et c’est ce qu’il faut pour ce que tu as. Tous les médecins le disent. »

Et là-dessus, on a embrayé sur les changements d’heure. Personne ici ne trouve que c’est une bonne chose, d’autant plus que c’était Giscard qui en avait pris la décision… et Giscard, c’était la droite. Mais enfin, deux fois par an, cela fait un sujet de conversation. Il y a les pour et les contre. Mais pendant ce temps-là, on oublie un peu la réforme des retraites, la guerre de Poutine et tout le bastringue.

Théophraste : « Ce n’est pas la peine de chercher midi à quatorze heures. »