La chronique de Théophraste. Les avettes, les guibettes et les guerzillons

Avettes ou guibettes ?

La gazette de Théophraste    Par Elie Geffray

Les « avettes », les « guibettes » et les « guerzillons.

Exceptionnellement et pour des raisons qui m’échappent et qui relèvent de codes subtils, dimanche dernier les femmes ont rejoint les hommes au « Haut-Débit » après la messe. « Petit jaune » pour les uns, « muscat » pour les dames. Alors, on n’a pas parlé de politique, mais du temps qui est tout « détraqué » depuis ces années-ci et même « que ce n’est plus comme dans le temps. Il y avait des saisons bien marquées. » Et la conversation a embrayé là-dessus.

Yolande : « Il y a une chose qui me chiffonne, moi, c’est la diminution des « avettes ». Je n’en vois plus beaucoup en train de butiner sur mes fleurs. Et pourtant chez nous, on aime bien le miel. »

Alice : « Ah ! Le miel ? Pour en avoir du bon qui soit pur, c’est délicat. Il faut faire attention où on l’achète. Dans les commerces, il est trafiqué la plupart du temps. »

Edmond : « Le miel, c’est indispensable. Chez nous, on en met dans notre grog du soir à l’hiver. C’est énergétique. »

Marcel : « Ah mais, le chouchen, ce n’est pas mauvais non plus. Bien frais, ça vaut un petit jaune en apéro. »

Hortense qui a l’esprit de synthèse résume : « C’est sûr que si les avettes disparaissaient, ce serait bien dommage ! »

Francis, scientifique : « Vous savez que la disparition des avettes, c’est le signe de la dégradation de la nature, à cause des pesticides et tout ça... »

Edmond : « T’as raison Francis, mais il n’y a pas que les avettes qui meurent. Je ne sais pas si vous l’avez remarqué, mais il y a de moins en moins de guibettes. »

Alice : « Mais moi, je ne les regrette pas ces bestioles-là. La nuit, en voiture, elles venaient s’écraser sur le pare-brise et sur les phares. Il fallait toujours avoir des chiffons et du liquide à la javel dans le coffre. Quand c’était séché, on avait beau frotter, c’était bien collé. »

Hortense synthétise : « C’est vrai qu’il n’y a plus de guibettes. Mais les avettes étaient utiles, pas les guibettes. »

Yolande toute attendrie par un souvenir d’enfance : « Il y a bien longtemps que je n’ai pas entendu de guerzillons non plus. J’aimais bien quand ils guerzillonnaient au coin de la cheminée le matin. On disait que ça portait bonheur. »

Alice : « Oui mais, je ne sais pas si c’est à cause des dérangements de la nature que l’on entend plus les guerzillons. C’est surtout qu’on ne fait plus guère de feu de cheminée maintenant. »

Edmond : « Des guerzillons ! Quand j’étais jeune, il y avait un groupe de musiciens qui avait pris ce nom-là, du côté de Broons, et ça guerzillonnait dans toutes les fêtes du coin. »

Hortense précise : « Ouais ! Il y a guerzillons et guerzillons. »

Théophraste : « Que celles et ceux d’entre vous qui ne savent pas ce que c’est qu’une avette, une guibette ou un guerzillon, lèvent la main. »