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Théophrase. Du "Gros-lait" qui se boit comme du petit lait.
Théophrase. Du "Gros-lait" qui se boit comme du petit lait.

La gazette de Théophraste     par Élie Geffray

Du « gros-lait » qui se boit comme du « petit lait. »

Des lectrices d’Ille-et-Vilaine qui ont le bon goût d’apprécier la « gazette de Théophraste » m’ont fait parvenir un pot de 500 gr d’une espèce de yaourt, pour analyse. Non pas bactériologique, l’analyse. Je n’ai pas de labo, et la chimie ce n’est pas ma spécialité. Elles doivent s’en douter mes admiratrices, car le pot était vide. Hé ! La prochaine fois faudra faire un petit effort ! Je veux bien rendre service, mais quand même... En fait elles attendent de moi une explication de texte pour comprendre la notice explicative imprimée en lettres vertes (ça sent l’écolo) sur le pot. Allons-y ! Risquons-nous. Avec un peu de pot, on devrait décrypter.

Je n’ai pas fait « breton 1ère langue », mais je me débrouille pour trouver que l’inscription principale en grosses lettres « gwell » veut dire à la fois « bon, meilleur » et aussi « levain, ferment. » Disons : « bon ferment » et « meilleur levain ». On peut inverser et dire : « bon levain » et « meilleur ferment ». L’essentiel c’est que « ça donne envie » et que c’est « sûrement bon pour ce que j’ai. » Voilà de bons arguments de vente.

Mais de quoi ce bon produit est-il fait, s’interrogeront les consommatrices en chaussant leurs lunettes pour lire la notice inscrite sur le pot, en vert également. Lisons ensemble : on annonce tout de suite « un gros-lait traditionnel de Bretagne ». Mais est-il bien raisonnable de proposer du « gros-lait » à une population qui rêve de sveltesse et de finesse ? À moins de nous persuader que ce produit s’avale « comme du petit lait. » On tente de nous en persuader en nous précisant que ce « gros-lait » est élaboré à partir d’un ferment indigène naturel. » Stop ! Première difficulté. Dans les livres scolaires de mon enfance, on voyait des représentations d’indigènes. Des populations lointaines, étranges, exotiques. Par prudence, j’aurais dit « ferment issu des pâturages bien de chez nous ! »

Mais passons, n’en faisons pas une querelle de vocabulaire. Entrons maintenant dans le dur. Lisez bien : « Le gwell valorise la biodiversité animale et microbienne sur des élevages herbagers à dimension humaine. » Passons sur la biodiversité animale et microbienne, tout cela sera pasteurisé et la pasteurisation reconnaîtra les siens. Mais reste la question des élevages « herbagers à dimension humaine. » Je sais bien qu’aujourd’hui on a tendance à rapprocher l’animal de l’homme. Il y a même des petits caniches qui sont plus intelligents que leur « mémère ». Et il y a des humains qui font facilement la bête. Tout cela pose une grosse question anthropologique. Vous voyez ce que je veux dire ? Pas bien. Bon d’accord. Alors dans ce cas je fais appel à Edmond, mon conseiller spécial pour des questions spéciales.

Edmond a lu la phrase deux ou trois fois tout fort en répétant « herbagers à dimension humaine. » Puis il a eu comme un éclair et s’est exclamé : « J’ai trouvé ! C’est une prairie sans clôture électrique, mais avec un pâtour (gardien de vache) comme autrefois. J’ai fait cela toute mon enfance. Comme dimension humaine comme ils disent là, il n’y a pas mieux. »

Théophraste : « En résumé : buvons du gros-lait traditionnel, refusons les clôtures électriques qui consomment de l’énergie et créons des emplois de pâtours. »

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